dimanche, avril 27, 2025
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[Tribune Libre] Création d’un think tank national : Le Président Brice Clotaire Oligui Nguema s’engage

Alors que notre pays ira aux urnes ce samedi, le Gabon d’après est déjà dans tous les esprits. Dans cette veine, le Pr Jean-François Owaye déroule – dans la Tribune ci-après – le tapis de la création, promise par Le Président de la Transition ,le 02 mars dernier, d’un Think tank aux universitaires. Pour le Vice-Recteur de l’UOB et président du Comité d’organisation de cette Rencontre « un think tank n’est autre chose qu’un groupe d’experts qui réfléchit sur les idées existantes et nouvelles qu’il « adapte aux besoins et aux contraintes du monde politique » (…) Sa fonction est ainsi d’établir des « ponts entre le savoir et le pouvoir ». Il génère des « idées originales et des options politiques » et fournit « un réservoir d’experts prêts à être employés par le gouvernement ». Lecture !

*Pr Jean-François Owaye

Je retiens de la rencontre du 02 mars 2025 entre le Président de la Transition, Président de la République, chef de l’Etat, les Enseignants-Chercheurs et Chercheurs, la gouvernance académique des Institutions d’Enseignement Supérieur et de Recherche (IESR) et les responsables des syndicats de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique du Grand Libreville, trois enseignements faîtières dont certains, comme la création d’un Think tank national que l’on pourrait nommer « La Grande Académie », sont des inédits.

En premier lieu, le Président de la Transition, le Général de Brigade Brice Clotaire Oligui Nguema, a marqué positivement les esprits par son humilité. Sa posture qui a consisté à sanctifier l’Université comme principal lieu de consécration des élites nationales a été unanimement saluée. La clarté d’esprit affichée a été assortie d’une exigence, l’éthique de responsabilité telle que le conçoit Michaël Burtun qui disait : « on est élite non pas seulement par ce qu’on est […] ; ni encore moins, par ce que l’on a […] ; mais on est élite aussi et surtout par ce que l’on fait, de ce que l’on est et/ou de ce que l’on a ». Ce rappel pneumatique intervient dans un environnement national caractérisé par l’apparition « de nouveaux équilibres et de nouvelles tensions entre les différentes tâches [assignées à l’universitaire] : enseignement, spécialisation, recherche, orientation, service à la collectivité ».

On comprend mieux, en deuxième lieu, la volonté du Président de la Transition de distendre définitivement les relations, restées trop longtemps brumeuses, entre l’élite universitaire, l’élite politique et l’élite militaire de notre pays. Au sortir de l’amphithéâtre de l’ENSET, nombreux sont les universitaires qui lui ont reconnu son excellente inspiration en mettant en exergue, au nom de l’éveil patriotique et de la reconnaissance due aux ouvriers de la science, l’idéal humaniste qui fonde le sacerdoce de ces derniers : « le talent d’instruire et de contribuer, disait Condorcet, aux progrès des sciences » donc de la société. Dans cette veine, le Président de la République n’a pas manqué d’insister fortement sur les valeurs universitaires traditionnelles et nouvelles de l’Université, mais aussi, par honnêteté intellectuelle, sur la dette historique due à l’Université gabonaise en tant qu’institution qui a accompagné, en dépit des difficultés rencontrées, les principales mutations sociales du Gabon, dont la dernière en date reste l’avènement de la démocratie dans les années 1990. Il suffisait de l’écouter pour s’en convaincre : « Mesdames et Messieurs les Universitaires, le pays a besoin de vous. Apportez-moi de bonnes idées, des idées constructives et structurantes, et si je ne les mets pas en œuvre, vous pourrez critiquer car, dans le même temps, je m’engage à garantir les franchises universitaires ». A travers cette interpellation, le Président de la Transition considère, à bon droit, les universitaires comme « une ressource nationale » précieuse et les établissements, « des banques de connaissances et de compétences », pour emprunter la sémantique de Kogan Moses et El-Khawas (1994).  Gordon (1997) égrène le chapelet infini des fonctions des Enseignants-Chercheurs et Chercheurs, qui attestent cette préciosité sociale.  Ils sont à la fois, « enseignants, hommes de science, praticiens, rédacteurs, modèles sociaux, découvreurs, inventeurs, chercheurs, concepteurs, explorateurs, experts, promoteurs, facilitateurs, évaluateurs, critiques, examinateurs, opérateurs, guides, superviseurs, mentors, auditeurs, conseillers, orienteurs, négociateurs, médiateurs, gestionnaires, entrepreneur », ouvreurs de pistes… C’est dire combien le Président de la Transition est en phase avec la modernité universitaire et l’assujettissement des universitaires aux grandes forces de l’histoire.

Sur cette base, je me permets de retenir, en troisième lieu, la place primordiale que le Président de la Transition accorde, pour taire les divergences et inimitiés du passé, faire émerger des paradigmes vertueux, à l’expertise nationale dans le sens bien compris de la participation des universitaires à la défense des intérêts nationaux et stratégiques du Gabon. Cette vision se crédibilise par l’officialisation de sa décision d’institutionnaliser un Think tank national dont l’animation sera confiée à des Universitaires émérites et experts aux talents reconnus ; une idée qui ouvre, in fine, la voie à une possible institutionnalisation de l’Académie des sciences du Gabon, à la valorisation de l’innovation technologique endogène, mais aussi à l’Eméritat et à l’Honorariat fortement sollicités par tous les acteurs de l’écosystème universitaire de notre pays.

Pour le Président de la Transition, il est essentiel qu’un « laboratoire des idées » soit mis en place, à brève échéance, en vue d’infuser « les débats politiques avec des données rigoureuses fondées sur des données probantes et une perspective africaine authentique ». Fini l’amateurisme, la pseudoscience et les savants en tout.

Ce cheminement a fait des émules dans d’autres pays où se sont imposés des think tanks, cas de The Economist  au Royaume Uni, Lowy Institute en Australie, Centre for International Governance Innovation au Canada, Observer Research Foundation en Inde, Getulio Vargas Foundation au Brésil, French Institute of International Relations en France, qui sont devenus autant d’outils d’aide à la décision travaillant en faveur du soft power et du smart power de leurs Etats respectifs, au moment où les incertitudes évoluent parallèlement au besoin d’une plus grande efficience des politiques publiques. Notre pays, qui accuse des retards abyssaux dans divers secteurs, en a fortement besoin. Jusqu’ici, très peu d’importance avait été accordée à la réflexion universitaire, disons à la recherche-innovation. Ce fut une faute de perspective. Comme l’écrivait Gustave Flaubert, « Une erreur [comme cette ignorance], fût-elle vieille de cent mille ans, par cela même qu’elle est vieille, ne constitue pas une vérité ! ». Le Président a raison de vouloir mettre les universitaires les pieds à l’étrier afin de bâtir, avec eux, un consensus sur le « Gabon que nous voulons ». Dans le « laboratoire des idées » qu’il va créer, les Enseignants-Chercheurs, les Chercheurs émérites et les experts non universitaires travailleront à assurer au Gabon, sa place dans un  monde marqué par la lutte des idées, des pouvoirs politiques et économiques. Les universitaires vont redevenir, ce qu’ils n’auraient pas dû cesser d’être dans la conscience de tous, les porteurs de débats d’idées, les porteurs de l’innovation y compris sociale. Pour l’essentiel, le Président de la Transition Brice Clotaire Oligui Nguema attend fonder son magister sur l’intelligence politique, économique, culturelle et stratégique, autrement dit sur des idées alternatives savamment construites afin d’être bénéfiques au processus de développement durable du Gabon. Je propose de bâtir cette nouvelle alliance de raison entre les élites du pays : « Le Consensus du 02 Mars ».

Ce Consensus établit les conditions d’une entente vertueuse entre l’élite universitaire, l’élite politique et l’élite militaire. L’élite universitaire sait plus que quiconque que désormais, «la production des savoirs ne suffit plus pour peser dans le débat des idées ». Des nouveaux espaces de réflexion, des « laboratoires des idées » sont nécessaires pour inventer des stratégies innovantes susceptibles de répondre aux défis du monde post moderne, notamment l’accélération de la croissance dont a urgemment besoin le Gabon. Soulignons qu’un think tank n’est autre chose qu’un groupe d’experts qui réfléchit sur les idées existantes et nouvelles qu’il « adapte aux besoins et aux contraintes du monde politique », générant des recherches iconoclastes et des analyses performantes sur les politiques publiques, influençant et informant l’opinion publique et les décideurs. Sa fonction est ainsi d’établir des « ponts entre le savoir et le pouvoir ». Il génère des « idées originales et des options politiques » et fournit « un réservoir d’experts prêts à être employés par le gouvernement ». Le Président de la Transition s’est engagé à en faire le fondement de son action politique. Il n’y a aucune raison qu’on y prête foi.

Sur le fonctionnement de cet aréopage de théoriciens et de praticiens, il nous suffira de tirer les leçons des choses vues. Par exemple, en France, l’IFRI a mis en place des « équipes qui produisent des visions multiples sur un monde multiple, dans une optique d’aide à la prise de décision stratégique ». Notre think tank national, dont les modalités de mise en œuvre sont impatiemment attendues, en fera de même dans trois directions, tout au moins : la recherche fondamentale (pour faire émerger des connaissances innovantes), les études (pour proposer des solutions sur des problèmes ponctuels rencontrés par le Gouvernement ou la société) et la prospective (pour dessiner un avenir de long terme).

Comme le souligne l’Agenda 2063 de l’Union Africaine, il n’est plus d’actualité que nos Etats continuent à faire office de « laboratoire ambulant, dans lequel des idées inventées ailleurs ont été expérimentées localement et inadéquatement ». Il va de soi que les universitaires gabonais gagneraient, au-delà des cloisons disciplinaires, à se coaliser pour saisir, ensemble, la perche tendue par le Chef de l’Etat. Il s’agit d’accepter l’idée d’une société savante nationale. L’Université Omar Bongo s’organise pour apporter au Chef de l’Etat un projet viable.

*Vice-Recteur de l’UOB

Président du Comité d’organisation de la Rencontre du 02 Mars 2025

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