dimanche, avril 27, 2025
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Gabon : Faut-il accorder du crédit aux « mea culpa » des hommes politiques après la chute de leur régime ?

Depuis l’avènement du multipartisme au Gabon, la scène politique a connu des évolutions, bien que parsemée d’inconstances. L’une des dynamiques les plus préoccupantes demeure la prolifération des partis politiques, souvent motivée par des intérêts opportunistes plus que par de réelles convictions idéologiques. Dans ce paysage mouvant, un phénomène intrigue et alimente le scepticisme populaire : les repentirs tardifs de certains acteurs politiques, dont l’éveil moral semble coïncider avec la fin de leurs privilèges.

L’histoire politique récente du Gabon est ponctuée d’exemples qui illustrent ce phénomène de regrets en apparence. Cela a été le cas, en 2009, au lendemain du décès d’Omar Bongo, André Mba Obame, s’était rapidement mué en opposant au régime qu’il avait pourtant servi, très avec un zèle des plus exceptionnels. Il s’était alors présenté aux Gabonais, lors de l’élection présidentielle anticipée, comme un homme nouveau et débarrassé de toutes les scories d’un pouvoir qu’il pourfendait dorénavant. Pourtant, nombre de ses détracteurs n’ont point manqué de lui rappeler qu’il a été l’un des artisans du verrouillage du système électoral, empêchant toute alternance pourtant souhaitée par toute la population, principalement par les personnalités politiques. Au premier rang desquels de véritables patriotes, tels Paul Mba Abessole, Pierre-Louis Agondjo Okawé, Pierre Mamboundou, Bénoît Mouity Nzamba, Adrien Nzoghé Nguema et bien d’autres baobabs de l’histoire politique contemporaine.

Confesser les dérapages passés

Parmi les persécuteurs de ces personnalités politiques, qui ne demandaient qu’une bonne gouvernance pour le Gabon et une alternance raisonnable, André Mba Obame, était alors considéré par l’opinion nationale comme la bête noire de l’opposition auprès du président Omar Bongo. Dans l’interstice de l’intérim assurée par Rose Rogombé, il s’était découvert une étoffe d’opposant, désormais très proche de la population et n’hésitant guère à confesser ses dérapages passés et demandant l’absolution populaire. Les observateurs avertis de la scène politique se posaient alors des questions : si AMO, opposant devenu, avait continué à bénéficier des prébendes du régime, aurait-il eu ce sursaut de conscience et de patriotisme ? Que s’était-il passé entre lui et son alter ego Ali Bongo au point de déverser leur antagonisme sur la place publique ? Dans tous les cas, le peuple gabonais jouait le rôle du dindon de la farce de cette scène.

En 2016, les acteurs ont changé, mais le scénario est demeuré le même. Ancien très proche du pouvoir et de la famille Bongo Ondimba, l’ancien président de la Commission de l’Union Africaine, n’ayant pas pu se faire réélire à la tête de l’UA, à la fin de son mandat, et attribuant, à tort ou raison, sa défaite à Ali Bongo, devenu président de la République, s’était fait l’égérie de la contestation gabonaise. C’est donc dans un esprit revanchard qu’il avait d’intégrer les rangs l’opposition. Et comme allocution d’adhésion à cette sphère, il avait déclaré : « Comme ils veulent m’emmerder, moi je vais aussi les emmerder ». Les dés étaient désormais lancés et la présidentielle de 2016 s’était inéluctablement muée en théâtre d’opérations d’une guerre politico-familiale, où tous les coups semblaient permis. Et le sang a abondamment coulé (au sens propre du terme) dans les rangs du vaincu.

Certes les Gabonais avaient reconnu avoir préféré Jean Ping à Ali Bongo (le contraire était impossible), mais ce dernier, détenant tous les leviers du pouvoir, avait fini par s’imposer sur le fauteuil présidentiel. Cependant, pour les Gabonais, tout en reconnaissant la « victoire volée à Jean Ping » reprochaient à celui-ci son engagement tardif dans l’opposition. Et son mea culpa avait été vu plus comme un remords que comme un acte de contrition, même tardif.

Une bricole pour faire élire son potentat de candidat

Jamais deux sans trois (« jamais 203 »). En 2023, c’est au tour de Billie By Nze, ancien Premier ministre et sempiternel porte-parole d’Ali Bongo, d’adopter une posture équivoque. En tentant de sauver le fauteuil de son maître totalement groggy, il avait entrepris quelques mois auparavant de modifier le code électoral d’un genre risible pour un régime démocratique. A défaut de ne pouvoir faire élire Ali Bongo par un Parlement servile, comme projeté, l’ancien syndicaliste estudiantin avait imaginé une bricole pour faire élire son potentat de candidat sur le même ticket des députés de son parti. Le peuple gabonais, pour faire échec à une telle « alchimie risible » s’est levé comme un seul homme, pour mettre en déroute un pouvoir en déperdition. A l’arrivée de la course, les militaires sous l’impulsion du Comité de transition pour la restauration des institutions (CTRI), avec à leur tête le général Brice Clotaire Oligui Nguema, ont décidé de « changer le fusil d’épaule ». Le peuple gabonais ne devrait pas servir cette fois d’holocauste. Et pour cela, il faut mettre fin à l’imposture et annuler « les résultats tronqués ». Le maître à penser d’Ali Bongo, laissé en liberté, s’est donné un temps de réflexion, en attendant de sauter à pieds joints dans la mare politique et à la suite faire son petit bonhomme de chemin.

Une quête de rédemption ou une simple survie politique ?

Pour la prochaine présidentielle du 12 avril prochain, Alain Claude Bilie By Nze, ne pouvant prêter sa jactance légendairement néfaste à Ali Bongo, s’est rappelé qu’il avait été très proche d’André Mba Obame. Il s’est donc décidé, à défaut de ne pouvoir se harnacher des hardes funéraires d’AMO, d’en prendre la posture. Et depuis des longs mois, il tente de se faire une virginité politique. Pour mieux s’acquérir une clientèle politique, il adopte un langage suborneur. Mais les Gabonais se laisseraient-ils aveugler par celui qui n’a pas eu pitié d’eux lorsqu’ils servaient de chair à canon face à l’arsenal déployé par Ali Bongo ? Dans sa quête d’une rédemption, parallèlement à sa survie politique, Alain Claude Bilie By Nze devrait s’apprêter à répondre aux questions que les électeurs ne manqueront pas de lui poser. Car, ces retournements de veste des anciens esclaves de maison des Bongo, loin de s’adonner à de véritables actes de contrition, oublient que les gabonais savent que sont des lions sous la peau de petits agneaux.

Dans un pays où l’alternance a longtemps été un mirage, les Gabonais, ne veulent plus se laisser berner par des discours trompeurs. Si André Mba Obame a su acquérir une certaine « rémission de ses péchés », c’est parce que son adversaire politique portait la guigne. Tous les Gabonais auraient voulu avoir même leur propre bourreau pour président qu’un Ali Bongo Ondimba, malgré ses promesses mirifiques. Aujourd’hui, l’infortune d’Alain Claude Bilie Bi Nze est qu’il a en face « garçon ». Et le peuple gabonais n’est point prêt à tourner le dos à ceux par qui est venu leur libération de plus d’un demi-siècle de servitude et de misère.

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